Dossier de presse
Il déserte

En 1962, le journaliste Georges de Caunes, « vedette » de la radio et de la télévision, se livre à une expérience hors norme : tel un moderne Robinson Crusoé, il décide de passer une année entière, avec son chien pour seule compagnie, sur une île déserte de l’archipel des Marquises.
Une soixantaine d’années plus tard, Antoine de Caunes entreprend de raconter la folle épopée vécue par son père. Elle n’aura finalement duré que quatre mois avant que celui-ci, affaibli et amaigri, ne soit rapatrié en urgence à Paris. Georges de Caunes avait pris soin de consigner son quotidien dans un journal intime qu’Antoine ne s’était jamais résolu à lire en entier. En collaboration avec Xavier Coste, auteur de 1984 et Journal de 1985, il se plonge enfin dans le récit paternel et en tire un album en bande dessinée.
Magnifié par la virtuosité du trait, l’imagination graphique et les couleurs flamboyantes de Xavier Coste, Il déserte est autant un formidable récit d’aventures qu’un bel hommage rendu par un fils à son père.

ENTRETIEN AVEC ANTOINE DE CAUNES
Qu’est-ce qui vous a donné envie de raconter cette histoire ?
Quand les éditions Dargaud m’ont proposé d’écrire un scénario de bande dessinée, l’idée de mettre en scène l’épopée de mon père dans son île s’est imposée de manière fulgurante. Ce n’était pas du tout prémédité et j’étais le seul à pouvoir la raconter.
Dans l’introduction de l’album, vous évoquez la dimension universelle du récit…
Il déserte parle des relations entre un homme et son fils. Et même si le mien n’était pas un père comme les autres, en raison de cette expérience et de sa notoriété, j’évoque en effet des thèmes communs à beaucoup de gens. Avec, en prime, la présence de l’aventure et de l’exotisme.
Pour quelle raison avez-vous attendu plusieurs années avant de vous plonger dans son journal intime ?
Je ne sais pas vraiment… J’aimais avoir l’objet à portée de main, mais j’avais du mal à l’ouvrir. J’en avais seulement lu quelques extraits et constaté que ce qu’il racontait à la radio, depuis son île, était très différent de ce qu’il vivait réellement.
Qu’est-ce qui vous a poussé à franchir le pas ?
Ce décalage entre la réalité et sa mise en scène m’intéressait, et j’étais séduit par l’idée d’une sorte de conversation croisée entre trois personnages. L’album entremêle le point de vue d’un enfant de huit ans qui fantasme sur cette aventure, celui du père qui relate son expérience en direct à la radio mais sans exposer ses états d’âme, et enfin, au bout de la chaîne, celui de l’homme de 71 ans que je suis aujourd’hui.

Votre père a-t-il changé de comportement à son retour à Paris ?
Non, il était toujours aussi taiseux avec ses proches, c’était sa nature profonde… S’il lui arrivait d’évoquer son expérience lors de conférences, il ne m’en parlait que par bribes. C’était sans doute une question de génération mais j’en ai souffert. Je l’aimais beaucoup et je l’admirais, et nous avons fini par dialoguer. Je lui avais proposé de me raconter sa vie en vue d’un livre d’entretiens, mais il n’abordait jamais de sujet intime.
Comment s’est déroulée votre collaboration avec Xavier Coste ?
J’avais été impressionné par son adaptation de L’Enfant et la Rivière, le roman d’Henri Bosco, et par sa représentation de la nature. Ce projet l’a tout de suite emballé, il lui donnait la possibilité de s’aérer l’esprit après ses deux albums « orwelliens », 1984 et Journal de 1985, qui l’avaient épuisé. Xavier est un artiste vif et réactif, avec lequel on ne perd pas de temps au moment de faire des choix graphiques et narratifs. J’ai adoré travailler avec lui !
ENTRETIEN AVEC XAVIER COSTE
« Georges de Caunes avait archivé tout ce qui concernait son aventure dans plusieurs classeurs. Antoine et moi étions comme deux explorateurs à la recherche d’un trésor ! Nous avons travaillé de manière totalement désorganisée, ce qui nous a beaucoup plu. J’aime qu’un livre soit une matière vivante et évolue en permanence. Nous n’écrivions pas ensemble, chacun travaillait de son côté, mais nous passions notre temps à rebondir sur les idées de l’autre.
J’ai commencé à dessiner le storyboard avant même qu’Antoine n’ait commencé à écrire. Je tenais à ce que le dessin soit enlevé, dans un style qui rappelle les carnets de voyage. Je n’avais pas de canevas défini a priori, et quand j’attaquais une page, je ne savais pas à quoi elle allait ressembler !
Je sortais de deux livres plutôt sombres et peu colorés, et cela m’a fait du bien de retrouver le plaisir de la couleur. Je jetais les couleurs de manière très instinctive, dans une sorte d’urgence. Nous avons réorganisé les séquences jusqu’au dernier moment. Nous avons réalisé ce livre en six mois, ce qui est un délai assez court, mais nous étions portés par notre énergie. Je n’ai qu’une hantise quand j’attaque un projet, c’est de m’ennuyer, et ici, le plaisir de faire était présent à chaque page !
J’ai bien aimé la dimension « hors du temps » de cette histoire, et j’espère que les lecteurs auront autant de plaisir à la lire que nous en avons eu à la raconter. »
